La lettre de la Gestion Privée Juin 2021

30/06/2021

1 min

Chers clients, chers amis,

A l’heure du déconfinement et reflux des vagues de la pandémie, c’est aux confins des mythes de la monnaie et des défis de la cybersécurité que je souhaite aborder un thème aux multiples facettes : les « cryptomonnaies » et leur alliée la « blockchain » 1. Par précaution 2 et humilité je me garderai de promouvoir une classe d’actifs de l’extrême (« crypto assets »), pour n’explorer que les enjeux sociétaux et disruptifs d’un phénomène en ébullition.

Le sens de l’histoire - Les îles Yap (Micronésie) ont basé leurs échanges sur de grandes pierres. Leur valeur s’effondra au 19ème siècle, après que leur importation d’îles voisines fut facilitée, provoquant la perte de leur « rareté ». A la confiance mise en l’or pour sa rareté, et sa longévité, se substitua celle accordée aux Etats. Certains ayant abusé de leurs planches à billets, des institutions monétaires rétablirent un système centré sur le dollar. A cet égard, les crypto-enthousiastes défient l’establishment avec une alternative aux monnaies ayant cours légal. Satoshi Nakamoto - invisible pseudonyme - a défié des siècles d’histoire pour instaurer une « technologie au service de l’Homme ». Le « Bitcoin » 3, en « capant » son volume d’émission, s’inspire nonobstant des enseignements de la mésaventure micronésienne.

Au cœur d’une famille disruptive - La technologie du « blockchain » est réputée vertueuse par son économie d’intermédiaires présumés de confiance, davantage de sécurité, et le respect de notre sphère privée. Elle ouvre par ailleurs la porte à des applications favorables aux nombreux exclus du monde bancaire. La mise en œuvre de contrats encryptés, la certification d’œuvres d’arts ou de propriétés intellectuelles, la traçabilité des chaines alimentaires, la gestion urbaine, ne sont que quelques exemples de sa symbiose avec des éco-activités innovantes et liées à l’intelligence artificielle.

Des modèles d’affaires revisités - Google a poussé la centralisation des données à l’extrême, mettant à risque son capital sympathie et la pérennité de son modèle. Les révolutions en cours promettent une approche plus collaborative. Suivant le modèle « DAO » 4 vous vous enrichiriez par l’exploitation d’une voiture autonome passant à travers la blockchain » des contrats avec des usagers solvables, incluant le rechargement des batteries et l’investissement de vos gains en cryptomonnaies : rêve ou réalité ? Un modèle de rapprochement entre les mégalopoles chinoises et ses villages isolés est illustré dans l’excellent ouvrage « Blockchain Chicken Farm » 5 : la technologie permet de confirmer aux consommateurs nantis des villes côtières l’origine des poulets fermiers de leurs campagnes. Quid de la surveillance des populations ? Me direz-vous !

Vertus sociétales - L’empreinte écologique rebutant les plus audacieux (cf. les contradictions d’Elon Mask), un travail important est dévolu à la mise en œuvre de protocoles moins énergivores. Ceci posé, une meilleure protection des données, une auto-gestion démocratique et un taux de corruption en voie de réduction, plaideraient en faveur de bonnes notes sociales et de gouvernance. Rassuré(e)s ?

Postures et géopolitique - Les oppositions restent vives entre adeptes de tous âges – tel la légende de l’investissement Paul Tudor Jones - qui s’ouvrent au nouveau monde, et banquiers centraux qui se défendent d’être en capacité de mieux gérer les chocs exogènes – pandémie - que ne le pourraient les pilotes anonymes d’une monnaie décentralisée. Ironiquement, en légiférant à leur encontre, plutôt qu’en les ignorant, les régulateurs légitiment l’inclusion des cryptoactifs et -monnaies au sein de la finance traditionnelle, alors que ses pionniers se plaisaient dans l’opposition. Cyniquement, la Chine, qui a interdit toutes transactions en cryptomonnaies depuis 2017, se prépare à l’émergence du « e-yuan » - au service de sa supervision - et réprimande ses « mineurs » 1 qui trouveront refuge en Asie du Sud Est ou aux Etats-Unis, voire à Zoug (premier canton helvétique permettant de régler ses impôts en « crypto »), à Dubaï, ou en Afrique. A contrario, le Salvador se profile comme un des premiers à vouloir accorder au « Bitcoin » 3 un cours légal sur son territoire et, encore hésitante entre deux extrêmes, l’Inde qui s’apprêtait à pénaliser, réfléchirait maintenant à légaliser.

Comme nous l’enseigne l’histoire, chacun y trouve son intérêt ou la justification de sa posture.

Excellent été, et bonne respiration,

  1. registre informatique d’une chaine de blocs d’informations encryptées dont le fonctionnement est assuré par des « mineurs » (fabricants) soumis à un protocole d’accès rigoureux

  2. Auris Gestion n’est pas répertoriée par l’AMF en tant que Prestataire de Services sur Actifs Numériques

  3. la plus diffusée des cryptomonnaies

  4. « Distributed Autonomous Organisation »

  5. par Xiaowei Wang, éd. McMillan 2020.

Nicolas Walther

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